● Jules de POLIGNAC -- (Paris ou Versailles 1780 - Saint-Germain-en-Laye 1847) ● Homme politique français. Il porte successivement les titres de comte de Polignac (1817-1820), de prince de Polignac (1820-1847), puis brièvement celui de 3e duc de Polignac en 1847. Il est le fils de la célèbre duchesse de Polignac, favorite de la reine Marie-Antoinette. Aide de camp du comte d'Artois. Il fut pair de France et ambassadeur de France à Londres. Ministre des Affaires étrangères et président du Conseil des ministres du 8 août 1829 au 30 juillet 1830, impopulaire, il joue un rôle crucial dans le déclenchement de la révolution de juillet 1830.Lot de 12 L.A.S – Années 1820 (une de 1842)
Attention : ces lettres ont été légèrement brulées, à des degrés plus ou moins importants selon les correspondances.
Aussi les parties supérieures de certaines sont difficiles à lire (voire parfois impossible) et fragiles : voir mes 5 photos qui donnent un aperçu.
= à étudier en l'état. Petit prix de départ du fait de cet état.
Pour celles dont le destinataire est identifié : elles sont adressées à M. Gallet, vice Président du Tribunal de 1è instance au PuyEnvoi soigné & protégé Information complémentaire sur le signataire de ce document :
Jules de Polignac est le fils cadet de Jules de Polignac (1746-1817)1, capitaine au régiment Royal-Dragons, et de Gabrielle de Polastron, comtesse puis duchesse de Polignac, amie et ancienne favorite de la reine Marie Antoinette et gouvernante des Enfants de France.
Au déclenchement de la Révolution française sa famille est l'une des premières à quitter la France. Jules a alors neuf ans, il est élevé parmi les émigrés.
Il est le frère d'Armand Jules Marie Héraclius, 2e duc de Polignac, auquel il succède au titre ducal le 1er mars 1847, la veille de sa mort.
Il se marie en 1816 avec Barbara Campbell, une aristocrate écossaise (décédée en 1819). De ce premier mariage naissent deux enfants : d'une part Armand (1817-1890), futur 4e duc de Polignac (ce sont ses descendants mâles en ligne directe qui conservent le titre nobiliaire) et d'autre part, Seyna-Camille (1818-1833).
En 1824 il se remarie avec Charlotte, comtesse de Choiseul, veuve du comte César de Choiseul (mort en 1821), née (Maria) Charlotte Parkyns (6 janvier 1792 – septembre 1864). Le mariage sera célébré une seconde fois en 1837, à la suite de la décision de mort civile qui le frappe après la révolution des Trois Glorieuses).
Son fils aîné, Jules-Armand de Polignac, lui succède au titre ducal, en 1847. Son second fils, Alphonse de Polignac, épouse en 1860 Jeanne Émilie, fille du banquier Jules Mirès.
De son second mariage avec Maria-Charlotte, Jules de Polignac a sept enfants, dont :
Prince Alphonse de Polignac (1826-1862) ;
Prince Ludovic de Polignac (1827-1904), lieutenant-colonel dans l'armée française qui participe à la colonisation de l'Algérie ;
Prince Camille Armand Jules Marie de Polignac (1832-1913), qui est major-général dans l'armée confédérée pendant la guerre civile américaine ;
Prince Edmond de Polignac (1834-1901), compositeur, théoricien de la musique et promoteur de la gamme octatonique.
Son ascension politique (1804-1828)
Jules devient l'un des aides de camps du comte d'Artois. Il est arrêté, avec son frère Armand, lors de la conspiration de Georges Cadoudal (1804) et est condamné à une peine de prison d'abord au fort de Ham puis à Vincennes. Son frère et lui côtoient le général Malet. Il s'évade avec son frère en 1813, et intègre les ultras en 1814. Il revient en France en 1814 avec le comte d'Artois (le futur Charles X), puis passe à Gand avec la famille royale durant les Cent-Jours.
Partisan d'une restauration intégrale de la monarchie et de l'Ancien Régime et hostile aux tendances libérales de la Charte de 1814, il devient pair de France le 17 août 1815. Lui et quelques autres refusent de prêter le serment. C'est également un ardent défenseur du catholicisme, il est fait prince romain en 1820 par le pape, avec autorisation de porter ce titre en France en 1822.
En 1823, il est nommé par Villèle et Chateaubriand ambassadeur à Londres, poste qu'il conserve jusqu'à 1829, il participe aux négociations du traité de Londres (1827), en tant que représentant du royaume de France, qui aboutissent au traité par lequel la France, la Grande-Bretagne et la Russie s'imposent comme médiateurs entre le Sultan turc et la Grèce insurgée. Une des conséquences de ce traité est la bataille de Navarin et à terme l'indépendance de la Grèce.
Il devient ministre des Affaires étrangères et président du Conseil le 8 aout 1829. La crise politique empire rapidement à la fin de cette année 1829. Le roi, qui a formé en août un nouveau ministère entièrement composé d'ultras pour contrebalancer la majorité de députés libéraux élus en 1827, ne désigne qu'en novembre un « président du Conseil ». Polignac est appelé par Charles X à succéder au ministère Martignac (1828), qui est la dernière tentative de compromis du roi avec la majorité parlementaire libérale.
Le retour des ultras (1829-mars 1830)
Le successeur de Martignac
Constatant l'échec de cette tentative de compromis, Charles X prépare, en sous-main, un revirement de politique : pendant l’été 1829, alors que les Chambres sont en vacances, il renvoie subitement le vicomte de Martignac et le remplace par le prince de Polignac. Publiée dans Le Moniteur le 8 août, la nouvelle fait l’effet d’une bombe. Le nouveau ministre des Affaires étrangères, qui apparaît rapidement comme le chef du ministère, évoque les plus mauvais souvenirs de la cour de Versailles— il est le fils de l’amie intime de Marie-Antoinette, la très impopulaire duchesse de Polignac — et de l’émigration, durant laquelle il a été le compagnon de Charles X en Angleterre. À ses côtés, le comte de La Bourdonnaye, ministre de l’Intérieur, est un autre ultra, qui s’est signalé en 1815 en réclamant « des supplices, des fers, des bourreaux, la mort, la mort » pour les complices de Napoléon Ier durant les Cent-Jours, tandis que le ministre de la Guerre, le général de Bourmont, est un ancien chouan rallié à l'Empereur avant de le trahir quelques jours avant la bataille de Waterloo.
L’opposition pousse des clameurs indignées :
« Coblentz, Waterloo, 1815 : voilà les trois principes, voilà les trois personnages du ministère. Tournez-le de quelque côté que vous voudrez, de tous les côtés il effraie, de tous les côtés il irrite. Pressez, tordez ce ministère, il ne dégoutte qu’humiliations, malheurs et chagrins2. »
Bertin aîné, directeur du Journal des débats, publie un article célèbre qui se termine par la formule : « Malheureuse France ! Malheureux roi ! », où il stigmatise « la cour avec ses vieilles rancunes, l’émigration avec ses préjugés, le sacerdoce avec sa haine de la liberté »N 1.
Il y a, dans cette véhémence, une part de mise en scène. Polignac, présenté comme un bigot fanatiqueN 2 obsédé par le droit divin des rois, est en réalité favorable à une monarchie constitutionnelle, mais considère que celle-ci n’est pas compatible avec une liberté de la presse sans limite ni mesure. Plusieurs ministres importants — Courvoisier à la Justice, Baron de Montbel à l’Instruction publique, Chabrol de Crouzol aux Finances, le baron d’Haussez à la Marine — sont plutôt libérauxN 3. Lorsque La Bourdonnaye démissionne le 18 novembre quand Polignac accède à la présidence du Conseil, il est remplacé par le Baron de Montbel, lui-même remplacé à l'Instruction publique par un magistrat libéral, le comte de Guernon-Ranville.
Rien ne permet d’affirmer que, comme l’a prétendu l’opposition, Charles X et Polignac aient voulu rétablir la monarchie "absolue" d’avant 1789. En réalité, ce sont deux conceptions de la monarchie constitutionnelle, c’est-à-dire deux interprétations de la Charte de 1814, qui s’affrontent en 1829-1830. D’un côté le roi veut s’en tenir à une lecture stricte : pour lui, le monarque peut nommer les ministres de son choix et n’a à les renvoyer que dans les deux cas prévus par la Charte (trahison ou concussion). De l’autre côté, les libéraux voudraient faire évoluer le régime à l’anglaise, vers un parlementarismeque la Charte n’a pas explicitement prévu : ils estiment que le ministère doit avoir la confiance de la majorité de la Chambre des députés. Ce débat ne sera d’ailleurs pas tranché par la monarchie de Juillet.
Pendant l'été 1829, alors que les Chambres sont en vacances, Charles X renvoie le vicomte de Martignac, et le remplace par le prince de Polignac. Le choix du prince de Polignac, ultra-royaliste connu et ministre des Affaires étrangères, soulève une grande émotion et déchaîne la presse de gauche. Celle-ci multiplie les critiques et les diatribes contre « Charles le Simple », ce roi bigot, conservateur, passionné par la chasse et les jeux. Le Globe salue l'événement d'une formule lapidaire qui fait mouche : « Son avènement sépare la France en deux : la Cour d'un côté, de l'autre la Nation. » Les « Hommes de 1815 » semblent revenir au pouvoir, un choix dont le roi porte l'entière responsabilité. Tant Polignac que ses ministres vont rapidement apparaître aux yeux d'une opinion qui lit une presse libérale en plein essor, comme des individus souhaitant établir une monarchie autoritaire, voire absolue. Il peut toujours être débattu sur la réalité d'une telle tentation chez Charles X (si elle a existé, elle ne s'est véritablement manifestée qu'en juillet 1830).
À son retour en France, les pourparlers en vue de la formation d'un nouveau ministère s'engagent avec le concours du fondateur des Chevaliers de la Foi, Ferdinand de Bertier de Sauvigny, sur la base d'une entente entre les divers courants de la droite. Mais de fait, la constitution de l'équipe ministérielle du prince de Polignac n'est pas des plus habiles.
Un ministère de combat
En effet, Polignac est accompagné de deux hommes qui suscitent une vive hostilité depuis le début de la Restauration. Le choix de François-Régis de La Bourdonnaye, un acteur de la deuxième Terreur blanche légale, sous la Chambre introuvable3, acerbe et intransigeant dans le domaine politique, nommé ministre de l’Intérieur, est très critiqué. Louis de Bourmont, ministre de la Guerre, était lui accusé d'avoir trahi4 Napoléon Ier le 18 juin 1815, veille de la bataille de Ligny, trois jours avant la défaite française de Waterloo, pour rejoindre Louis XVIII à Gand. Cela engendre une violente attaque du Journal des débats qui, dans une formule restée célèbre, résume ainsi le nouveau ministère : « Coblenz, Waterloo, 1815 ! » Ce qui signifie : émigration, trahison, répression. Plus modérés apparaissent Jean de Courvoisier à la Justice et Martial de Guernon-Ranville aux Affaires ecclésiastiques et à l'Instruction publique mais qui apparaissent comme des ministres plutôt maladroits à l'exception de Chabrol aux Finances et de Charles Lemercier de Longpré, baron d'Haussez, à la Marine. La fin de l’année 1829 se passa sans que fût prise la moindre décision d’importance. La démission de La Bourdonnaye le 17 novembre, hostile à la nomination de Polignac à la présidence du Conseil, fut le seul fait politique notable.
Polignac se rendit rapidement impopulaire auprès de l'opposition par des mesures politiques autoritaires et réactionnaires. Il y a, dans cette véhémence, une part de mise en scène. Polignac, présenté comme un bigot fanatique obsédé par le droit divin des rois, est en réalité favorable à une monarchie constitutionnelle, mais il n'est pas favorable à une liberté de la presse sans limite ni mesure. Les élections de 1828 montrèrent que les électeurs n’appréciaient guère de tels retours en arrière. Il y a une opposition de plus en plus vive entre le ministère Polignac (1829-1830), et la Chambre. La politique ultra-royaliste du ministère, qui consiste à revenir sur certaines avancées de la période révolutionnaire, suscite l’opposition des libéraux.
Sur le plan de la politique étrangère, Polignac souhaite travailler au renforcement et à l'agrandissement du royaume ; en 1829, l'armée russe marche sur Andrinople et Constantinople. Comme Richelieu et Pasquier en 1821, comme La Ferronays en 1828, il pense possible d'étendre la France dans le cadre d'une réorganisation européenne consécutive à l'effondrement de l'Empire ottoman. La direction des affaires politiques du ministère des Affaires étrangères est dirigée par Charles-Edmond, baron de Boislecomte, qui rédigea un mémoire approuvé par le Conseil des ministres le 3 septembre 1829 : la France aurait aidé la Russie à s'emparer de territoires ottomans en Asie et Europe, et en échange, aurait récupéré les territoires perdus en Allemagne en 1814 Sarrelouis, Sarrebruck et Landau, ainsi que la Belgique et le Luxembourg. La maison d'Orange aurait régné en Constantinople, la Prusse aurait annexé la Hollande et la Saxe, le roi de Saxe aurait régné sur la rive gauche du Rhin5,6. Le recul russe rend impossible toute mise en œuvre de ce projet.
Crise politique et dissolution de la Chambre
La réunion de la Chambre le 2 mars 1830 allait montrer la force du conflit qui couvait. C’est à la suite de son discours du Trône que le conflit éclate ouvertement entre la Chambre et le pouvoir. Dans son discours d'ouverture de la session, Charles X évoqua l’existence de « coupables manœuvres » envers son gouvernement, ajoutant qu’il saurait trouver la force de les surmonter. Il annonce l’expédition militaire d’Alger et menace implicitement l’opposition de gouverner par ordonnances en cas de blocage des institutions. La gauche libérale, majoritaire, comprit ce passage comme l’annonce d’un possible coup d’État. En effet, l’adresse votée par la majorité des députés, tout en mettant en avant, avec une déférence appuyée, des sentiments monarchiques, affirme face au ministère, les droits de la Chambre. Sous la direction de Royer-Collard, elle rédigea, le 16 mars 1830, une adresse au roi que signèrent 221 députés sur 402, signifiant à Charles X leur défiance : « La Charte consacre comme un droit l’intervention du pays dans la délibération des intérêts publics […]. Elle fait du concours permanent des vues politiques de votre gouvernement avec les vœux de votre peuple la condition indispensable de la marche régulière des affaires publiques. Sire, notre loyauté, notre dévouement, nous obligent à vous dire que ce concours n’existe pas. »
La réaction de Charles X est sans surprise. Pour couper court à l'adresse des 221 du 18 mars 1830 qui refuse d‘accorder sa confiance en Polignac et qui dénonce son ministère, et pour se reconstituer une majorité parlementaire favorable, Charles X proroge la Chambre dans un premier temps. Ensuite il procède à la dissolution de la Chambre des députés le 16 mai 1830 et annonce de nouvelles élections les 23 juin et 3 juillet. Opposés à la dissolution, Chabrol et Courvoisier démissionnent, remplacés par Guillaume-Isidore de Montbel aux Finances et Pierre-Denis de Peyronnet, à l'Intérieur : le ministère Polignac prend une teinte réactionnaire encore plus marquée. Depuis le printemps 1830, nombreux était ceux qui s’attendaient à un affrontement avec le roi : mais rares, au total, étaient ceux qui envisageaient une révolution et un changement de dynastie. Charles X, quant à lui, espère trouver un appui populaire, notamment rural, qui lui donnerait une majorité parlementaire. Il compte aussi sur le prestige que son gouvernement retirerait de l’expédition d’Alger.
La fin de la branche aînée des Bourbons (avril 1830-juillet 1830)
L’expédition d’Alger
Charles X et Polignac espèrent que l’expédition d’Alger, lancée le 25 mai, leur donnera un prestige suffisant pour remporter la bataille électorale. L’expédition d’Alger s’inscrit dans un double contexte international et national. Sur le plan international, il s’agit pour la France de participer au démembrement de l’Empire ottoman. D’autre part, un contentieux existe entre la France et le Dey d'Alger, qui aurait frappé d’un coup d’éventail au visage le consul de France, Deval, le 30 avril 1827, pour une sombre histoire de livraison de blé algérien impayé par les Français. Charles X et Polignac répliquent aussitôt en établissant un blocus devant Alger, mais ils n’obtiennent pas réparation de l’offense. C’est sous ce prétexte que l’expédition est lancée en mai 1830, il s'agit aussi de faire diversion aux problèmes politiques intérieurs rencontrés par Charles X et Polignac. Le corps expéditionnaire, commandé par Bourmont, se compose de 103 navires, sous les ordres de Duperré, et de près de 75 000 marins et fantassins, qui débarquent en terre algérienne le 13 juin 1830. Mais la nouvelle de la prise d’Alger par le corps expéditionnaire, le 5 juillet, n’arrive en France que le 9 juillet, alors que les élections ont déjà eu lieu dans la plupart des départements. C’est trop tard pour modifier le cours des élections. Du reste cette conquête laisse l’opinion française presque indifférente et ne correspond à aucun projet politique d’envergure.
La défaite électorale[modifier | modifier le code]
En juin et juillet, Peyronnet et Polignac multiplient les interventions. Ils font notamment ajourner les élections dans vingt départements aux 13 et 19 juillet, exaspérant les mécontentements. Le 14 juin, le roi en personne publie une proclamation contresignée par Polignac, afin de convaincre les électeurs. Pour leur part, les libéraux, autour de leurs journaux d'opinions et sociétés politiques comme « Aide-toi, le ciel t'aidera », alors dirigée par Odilon Barrot, mènent une campagne active. En dépit de pressions multiples exercées par les préfets sur les électeurs, le discours des libéraux portent ses fruits, de sorte que le résultat des scrutins confirme la poussée de l’opposition. Étalées du 23 juin au 19 juillet, elles donnent une majorité renforcée à l’opposition libérale. Les « 221 » (parmi lesquels dix-neuf seulement ne sont pas réélus) se retrouvent 274, les ultras 145. L’échec est cuisant pour Polignac, plus encore pour Charles X qui avait dissout la chambre précédente. Le blocage constitutionnel apparaît dans toute sa force : soit la Chambre impose ses vues au roi, obtenant la démission de Polignac et la nomination d’un ministre libéral — et on entrera alors dans une monarchie de type parlementaire —, soit le roi tente l’épreuve de force, manifestant clairement sa défiance envers le choix fait par les électeurs. Le roi choisit la seconde hypothèse. Charles X répond que « [ses] résolutions sont immuables ». Le lendemain, une ordonnance ajourne la session au 1er septembre, ce qui met le Parlement en vacances pour six mois. À ce moment, le roi est déterminé à aller jusqu’au bout : « J’aime mieux monter à cheval qu’en charrette » aurait-il déclaré.
Les quatre ordonnances de Saint-Cloud[modifier | modifier le code]
Lors du conseil des ministres du 6 juillet, Polignac constate que le gouvernement par ordonnances, sur la base de l’article 14 de la Charte, envisagé de longue date, est désormais le seul recours. Malgré les réserves de Guernon-Ranville, Charles X tranche en ce sens dès le lendemain. Les principales mesures sont d’ores et déjà arrêtées : nouvelle dissolution de la Chambre des députés, modification de la loi électorale, organisation de nouvelles élections, suspension de la liberté de la presse. Pour Charles X, la gauche, en harcelant le ministère, veut renverser la monarchie : il ne saurait donc être question pour lui de renvoyer le cabinet et le gouvernement par ordonnances est le seul moyen de maintenir la CharteN 4.Article détaillé : Ordonnances de Saint-Cloud.Le lendemain, 9 juillet, arrive à Paris la nouvelle de la prise d’Alger. Cette gloire militaire qui vient auréoler un régime à bout de souffle conforte le roiN 5 dans ses intentions. Mais elle lui aliène l’Angleterre, d’autant que Charles X fait répondre avec hauteur aux demandes d’éclaircissements adressées par le cabinet britannique, et ce soutien lui manque lors des journées de Juillet.
À partir du 10 juillet, le roi et les ministres préparent les ordonnances dans le plus grand secret. Même le préfet de police et les autorités militaires ne sont pas mis dans la confidence, de sorte que rien n’est organisé pour maintenir l’ordre dans la capitaleN 6.
L’opposition libérale, qui se doute qu’un coup de force se prépare, redoute une insurrection populaire qu’elle n’est pas certaine de pouvoir maîtriser. La grande majorité des députés libéraux, issus de l’aristocratie ou de la bourgeoisie aisée, ne sont nullement démocrates. Le 10 juillet, une quarantaine de députés et de pairs, réunis chez le duc de Broglie, décident qu’en cas de coup de force, ils refuseraient le vote du budget. Parallèlement, des discussions sont engagées avec l’entourage de Charles X par l’intermédiaire d’un de ses familiers, Ferdinand de Bertier de Sauvigny. Les députés proches du Palais-Royal pourraient accepter le maintien de Polignac, des modifications de la loi électorale et du régime de la presse, moyennant l’entrée dans le cabinet de trois ministres libéraux dont Casimir Perier et le général Sébastiani. Mais ces discussions tournent court : Polignac préfère jouer le tout pour le tout et tenter l’épreuve de force.
Le duc d’Orléans, de son côté, passe l’été dans son château de Neuilly, où il s’est installé avec sa famille le 9 juillet. Il fait l’indifférent et attend son heure. Le marquis de Sémonville, grand référendaire de la Chambre des pairs, vient lui rendre visite le 21 juillet et lui fait des ouvertures précises :
– La couronne ? Jamais, Sémonville, à moins qu’elle ne m’arrive de droit !
– Ce sera de droit, Monseigneur, elle sera par terre, la France la ramassera et vous forcera à la porter7.
La journée du 25 juillet est marquée par des manifestations sur les grands boulevards et même une émeute contre le corps de garde de la Bourse, au palais Brongniart8 qui dégénère en incendie du corps de garde en planches. Le 25 juillet aussi, à onze heures du soir, le garde des sceaux, Chantelauze, remet les ordonnancesN 7 au rédacteur en chef du Moniteur pour qu’elles soient imprimées dans la nuit et publiées au matin du lundi 26 :
la première ordonnance suspend la liberté de la presse et soumet toutes les publications périodiques à une autorisation du gouvernement ;
la deuxième dissout la Chambre des députés alors que celle-ci vient d’être élue et ne s’est encore jamais réunie ;
la troisième écarte la patente pour le calcul du cens électoral, de manière à écarter une partie de la bourgeoisie commerçante ou industrielle, d’opinions plus libérales, réduit le nombre des députés de 428 à 258 et rétablit un système d’élections à deux degrés dans lequel le choix final des députés procède du collège électoral de département, qui rassemble seulement le quart des électeurs les plus imposés de la circonscription ;
la quatrième convoque les collèges électoraux pour septembre ;
les cinquième et sixième procèdent à des nominations au Conseil d’État au profit d’ultras connus tel que le comte de Vaublanc par exemple9.
Rédacteur dans le nouveau journal le National, Armand Carrel, libéral et républicain convaincu, écrit : « La France retombe en révolution par le fait même du pouvoir ». Aux yeux de l’opinion publique, ces ordonnances apparaissent comme un véritable coup d’État.
Pour sa défense, Polignac dira plus tard avoir agi par conviction et pour empêcher l’opposition de mener la France à un nouveau 1793 : la question sociale l’aurait emporté sur la rivalité politique dans les motivations de sa décision.
En quelques jours, la publication des quatre ordonnances entraîne la chute du régime : c'est la révolution des Trois Glorieuses, qui fait tomber les Bourbons et amène au trône Louis-Philippe d'Orléans, issu du régicide Philippe-Égalité.
C'est la chute du régime comme l'avaient redouté Charles X et Polignac.
Les Trois Glorieuses et la déchéance
Dès le début de la révolte, Jules de Polignac s'enfuit, errant quelque temps en Normandie avec l'aide du comte de Semallé, puis est arrêté à Granville avant d'avoir pu passer en Angleterre. Preuve de son impopularité persistante, une émeute survient à Paris les 17 et 18 octobre 1830 pour que soient livrés les quatre ministres de Charles X arrêtés, dont Polignac. Ils sont sauvés par l'attitude du général Daumesnil, gouverneur du fort de Vincennes où sont emprisonnés les ministres.
Polignac est finalement jugé devant la Chambre des pairs. Le comte Jean Bérenger, est chargé de l’accusation et du rapport au Roi. Extrait de son plaidoyer :
« La presse périodique détruite; la censure rétablie; les opérations des collèges audacieusement annulées sous la forme d'une dissolution de la chambre des députés ; nos lois électorales abrogées et remplacées par un vain simulacre d'élection ; la force des armes inhumainement employée pour comprimer l'indignation et pour assurer le succès de ces désastreuses mesures : voilà les crimes dont la réparation est due au pays. Mais plus la nation a droit à ce que la réparation soit éclatante, plus il lui importe que le haut tribunal qui est appelé à la prononcer soit indépendant et libre : s'il pouvait cesser de l’être, s'il y avait sur lui une apparence même légère d’oppression, sa décision ne serait pas un jugement; la France, l'Europe, la postérité lui en contesteraient le caractère »10.
Reconnu coupable, il est condamné à la prison perpétuelle et à la mort civile. C'est au cours de sa captivité, au château de Ham, qu'il écrit un livre défendant ses positions, Considérations Politiques (1832). La mort civile entraîne la dissolution de son mariage d'avec Charlotte, mais la captivité qu'il subit reste suffisamment souple pour qu'il puisse recevoir les visites de son (ex)-épouse, et deux enfants naitront pendant sa captivité. Ce fait d'actualité inspire le Congrès national qui inscrit dans la Constitution de la Belgique l'abolition de la mort civile ; durant les débats, l'affaire Polignac est évoquée, provoquant les rires des constituants11,12.
Le 23 novembre 1836, il bénéficie d'une amnistie décidée à l'instigation du premier ministère de Louis-Mathieu Molé. Sa peine est alors commuée en vingt années de bannissement hors de France, exil qu'il passe en Angleterre, avant d'être finalement autorisé à rentrer en France à la condition qu'il ne prenne plus jamais sa demeure à Paris, ce qui l’empêche de fait de participer à la vie politique nationale. C'est pendant son séjour en Angleterre qu'il renouvelle ses vœux avec Charlotte, devant le consul de France13.
Jules meurt à Saint-Germain en 1847. Environ un mois avant, il avait pris le titre de duc de Polignac à la mort de son frère aîné, Armand, mort sans enfants.
SOURCE : wikipedia
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